La mouette, tourne autour de l’amour non-partagé, ronde de sentiments éprouvés, de passions ravagées puisque Medvedenko est amoureux de Macha qui elle est amoureuse de Konstantin Treplev, qui lui-même est amoureux de Nina, qui quant à elle soupire pour Trigorine, l’amant d’Arkadina. Anton Tchekhov lui-même disait en parlant de sa pièce qu’elle contenait « cinq tonnes d’amour »

Chacun cherche l’autre sans succès, la pièce étant une succession de vies gâchées, de rêves inachevés, d’ambitions non atteintes. Vision très sombre mais très belle où rêves et aspirations virent à l’échec.

Tchekhov dépeint comme à son habitude les hommes fragiles et vaniteux et démontre que leur fatalité est dans une vie de solitude. Ses sujets d’étude de prédilection étant les passions, les illusions et les conflits des personnages, la mouette rassemble tous ces éléments-là.

La scénographie épurée de Grégoire Faucheux, est très belle, quelques chaises de jardin, un banc et puis cette scène de théâtre faite de plots de bois carrés, fragile installation qui vibre et se déconstruit au fur et à mesure de la pièce. Sur une toile au fond du plateau une toile peinte changeante au fur et à mesure des humeurs et des sensibilités exprimées par les comédiens. C’est dans ce décor, dans ce jardin que l’on devine, devant ce lac que l’on imagine que se trame l’intrigue, que se font et défont les amours entre les personnages.  Nous avons également beaucoup aimé les superbes lumières de Nicolas Faucheux.

Plus qu’une pièce, cette mouette est une succession de tableaux dans lesquels les personnages s’aiment, et s’affrontent. L’incompréhension qui règne entre eux façonne leurs insatisfactions, et brise leurs idéaux. Les scènes prises individuellement sont intéressantes mais l’ensemble manque un peu d’unité et de rythme (on s’ennuie un peu) malgré l’interprétation tout en finesse et la très grande justesse des comédiens. La mise en scène assez classique laisse la part belle au texte et les mots de Tchekhov raisonnent parfaitement, scènes intimes et discours critiques sur le théâtre nous parviennent. Ce que l’on doit également à la traduction moderne de Gérard Wajcman.

Une pièce intéressante.

P.S. : Lors de sa très dynamique première apparition, Pauline Bolcatto, pose son pied sur un plot mobile de la scène. Celui-ci vacille et manque de tomber, sa cheville se tord mais elle se récupère à temps. Pendant la demi-heure qui a suivi j’ai craint pour les comédiens…

De Tchékhov
Mise en scène : Brigitte Jaques-Wajeman
Texte français : Gérard Wajcman
Collaboration artistique : François Regnault & Clément Camar-Mercier
Scénographie : Grégoire Faucheux
Lumière : Nicolas Faucheux
Création sonore : Stéphanie Gibert
Costumes : Chantal de la Coste
Maquillage : Catherine Saint-Sever
Assistant mise en scène : Pascal Bekkar

Avec : Pauline Bolcatto (Nina, actrice), Raphaël Naasz (Treplev, écrivain, fils d’Arkadina), Bertrand Pazos (Trigorine, écrivain, amant d’Arkadina), Raphaèle Bouchard (Arkadina, actrice, mère de Treplev), Sophie Daull (Paulina, épouse de Chamraiev, mère de Macha), Timothée Lepeltier (Medvedienko, instituteur), Fabien Orcier (Dorn, médecin), Pascal Bekkar (Sorine, propriétaire du domaine, frère d’Arkadina) & en alternance Vincent Debost / Luc Tremblais (Chamraiev, régisseur, père de Macha, époux de Paulina) Hélène Bressiant / Sophie de Fürst (Macha, fille de Paulina & Chamraiev)

Théâtre de la ville – Abbesses jusqu’au 25 février 2023

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