Elle c’est Yalda, la fille de Mina et Fereydoun, et c’est elle qui raconte. Elle est née à Paris mais ses parents viennent d’Iran où il est interdit de s’exprimer et où un tyran en remplace un autre. Alors elle décrit leur lutte pour la liberté, puis la fuite et finalement leur vie en France en tant que réfugiés politique. 4211km, c’est la distance entre Paris et Téhéran, c’est la distance entre leur ville et leur pays d’adoption. Elle raconte le courage et la résilience de ses parents qui ont décidé de se battre puis qui ont choisi de fuir pour survivre.

Elle parle de leur amour de ce pays si éloigné au propre comme au figuré. Elle raconte sa famille, et le déchirement entre ces deux mondes, pour ces hommes et femmes qui survivent sans se plaindre. Elle dévoile aussi sa propre souffrance et sa recherche d’identité avec cet héritage si difficile à porter et le poids du passé si compliqué à supporter. Elle est « française mais pas que ».

Yalda ne se souvient pas, elle n’était pas née, ou trop petite mais on lui a raconté. Elle remonte le temps avec nous de 2011 à 1981 à 1977, de Paris à Téhéran.

C’est l’histoire de la lutte pour la démocratie, c’est la grande Histoire qui se mélange avec leur histoire intime et familiale avec beaucoup de dignité et de sincérité. Et puis l’exil, 40 ans loin de leur pays : Yalda décrit les cours de français pour l’intégration et l’insertion, le manque de ceux qui sont restés, le mal du pays, des odeurs, des plats, et puis les amis de passage qui viennent pour quelques jours ou quelques mois squatter l’appartement déjà si petit.

Yalda est fille de réfugiés, exilée malgré elle, on lui a transmis la guerre et la révolte et ça lui colle à la peau. Elle ne veut pas oublier ses ancêtres, ni nier ce passé, ni renier ce pays qu’elle n’a pourtant pas connu.

La musique est omniprésente, il y a des chants et des danses ; la culture de leur pays s’installe dans leur appartement de la région parisienne et par conséquent sur la scène devant nous. La pièce va vite, tout s’enchaîne sans temps mort, Les liaisons et changements sont ultra fluides et intelligents. La mise en scène efficace liée à la très belle scénographie propose une succession de scènes tantôt drôles, tantôt puissantes, tantôt émouvantes. Avec un décor très simple, quelques draps, quelques tapis, quelques éléments de costumes on est transporté dans les différents lieux de l’intrigue. Tous les comédiens et comédiennes sont investis, sincères et justes.

La pièce est remplie d’amour filial, amicale et nationale. Le message est plein de respect et d’espoir et bien sûr rempli de toute la tristesse possible pour les évènements et la violence qui continuent là-bas. On pleure (beaucoup), on rit, on est touché au cœur par cette une épopée théâtrale. Une pépite théâtrale comme on aime.

P.S. : J’avais déjà quatre pièces prévues cette semaine là mais je me décide à ajouter cette pièce à mon programme, je me rends compte un peu tard que c’est un jour de grève des transports. j’hésite jusqu’à la dernière minute à annuler ma venue mais un pressentiment me fait maintenir mon engagement. A la fin de la pièce je ne sais pas encore comment je vais faire pour rentrer chez moi mais je suis heureuse et comblée d’avoir pu partager ce moment de théâtre, le reste ne compte pas.

Texte et mise en scène Aïla Navidi
Assistante à la mise en scène Laetitia Franchetti
Avec June Asssal, Sylvain Begert, Benjamin Brenière, Florian Chauvet, Alexandra Moussaï, Aïla Navidi, Olivia Pavlou-Graham
Lola Blanchard en alternance avec June Assal, Thomas Drelon en alternance avec Sylvain Begert.

Du 10 janvier au 25 février 2024 au Studio Marigny

© Dimitri Klockenbring

Laisser un commentaire