Mickael grandit avec un père absent, entouré de femmes et de son frère jumeau qui, à l’inverse de lui, se conforme à ce que les autres attendent d’un garçon puis d’un jeune homme. Car en effet, Mickael ne correspond pas aux codes classiques, il ressemble trop à une fille, joue trop à la poupée, n’est pas assez musclé, en un mot, il n’est pas assez viril !

Tous les gens qui gravitent autour de lui ont une idée précise de ce qu’il doit être et de ce qu’il doit devenir. Alors Mickael va tenter de lutter contre les clichés et se construire tant bien que mal en subissant l’intolérance et la mesquine tyrannie de la masculinité.

Cette recherche de la virilité à tout prix et ce culte de l’hétéro normé au sein d’une société construite sur des stéréotypes rendent compliqué la construction de l’identité d’un jeune ayant une part féminine importante. Petites ou grandes brimades, cruauté masculine, maladresse féminine, supplice des vestiaires, violences verbales volontaires ou inconscientes, pressions extérieures, recherche et questionnement intérieur, voilà le quotidien de cet enfant, adolescent et jeune adulte. Combien de temps avant de se comprendre, de s’accepter et de s’assumer…

Pendant plus d’une heure, on assiste à un plongeon, une nage libre au plus profond de ses réflexions, Mickaël Delis, auteur et comédien se raconte et nous offre ses considérations sur sa propre identité, il partage sans fard ni faux-semblant ses angoisses, ses doutes, ses fausses routes et ses petites victoires qui ont fait de lui ce qu’il est devenu.

Ce spectacle et comme une confession, un travail très personnel, construit de longue haleine. C’est d’ailleurs une pièce survivante, programmée avant l’épidémie de la COVID, déprogrammée, reprogrammée, re déprogrammée et enfin reprogrammée à nouveau. Aléas qui ont aussi permis l’évolution et la finition de ce spectacle très abouti.

La scénographie est épurée, sans artifice, laissant la place libre à la fantaisie et la puissance du comédien. Celui-ci a une grande liberté corporelle, une fluidité et une légèreté verbale qui nous entraine dans son récit à plusieurs voix.

Le premier sexe c’est aussi une référence, un parallèle, un écho au texte de Simone de Beauvoir Le deuxième sexe. L’auteur, tout en parlant de sa propre expérience, fait un constat, une analyse de la perception de la virilité et de la masculinité. Partant de l’intime pour s’exprimer sur une vision sociale et sociétale de la position de l’homme.

Le texte est d’une grande finesse, introspection intelligente sans complaisance qui nous pousse à nous interroger sur notre propre approche des sujets abordés, quel est finalement notre propre rapport au genre ? L’écriture de Mickael Delis est vive, mordante, précise. L’humour n’est jamais loin, remplie d’autodérision et de mise à distance mais pour autant le fond est là, puissant et profond. C’est un seul en scène à texte, comme on disait des chansons à texte, le message passe et l’on en ressort changé et nourri.

Un brillant seul en scène nécessaire et inspirant. Un spectacle drôle, rempli de tendresse et de douceur jusqu’au très beau final, discours à l’enfant qu’il a été.

A voir jusqu’au 18 juin au théâtre de la Reine Blanche.

texte + jeu=Mickaël Délis
mise en scène=Vladimir Perrin + Mickael Délis
collaboration artistique=Elisa Erka + Clément le Disquay + Elise Roth + David Eélis
collaboration à l’écriture=Chloé Larouchi
création lumière=Jago Axworthy

© Marie Charbonnier

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